01 décembre 2025
L’architecture a la capacité de synthétiser les enjeux souvent contradictoires de notre époque : réduction des émissions carbone et équilibre économique de la construction, qualité d’usages et densité. Elle porte également une idée essentielle : l’interdépendance entre les lieux et les existences. Faire de l’architecture, c’est avoir une approche stratégique de l’espace et de son environnement. ET c’est les penser comme des outils de transformation de la ville au bénéfice de ses futurs occupants.
Nous l’expérimentons actuellement en construisant avec Paris Habitat 10 logements au 5, passage Jean Nicot, au cœur du quartier du Gros Cailloux dans le 7eme arrondissement de Paris.
Le site est une parcelle étroite de 146 m² en dent creuse, au cœur d’un îlot dense, accessible uniquement par un passage étroit, relié par deux porches à la rue Sainte Dominique et à la rue de Grenelle. Alors que l’ensemble de nos projets milite pour une utilisation de matériaux biosourcés, géosourcés et de réemploi, le projet du passage Jean Nicot est une illustration de leur pertinence dans des contextes métropolitains.
Ici, impossible d’utiliser des engins lourds de manutention et de levage, et donc des méthodes conventionnelles de réalisation d’un chantier. Là où la production standard du bâtiment pense à couler, nous avons plutôt pensé à assembler. Le projet est ainsi constitué de petits éléments légers, capables d’être acheminés sur site : une structure en poteau-poutre bois et planchers en solives bois, des murs en ossatures bois remplis en blocs de béton de chanvre isolant, et un rez-de-chaussée en briques porteuses pour répondre à la contrainte du PPRI (zone inondable). Le projet opère alors un renversement de valeur : la matière est simple et peu couteuse, mais elle demande un savoir-faire, des charpentiers notamment, et une main d’œuvre qualifiée et nombreuses sur le chantier.
En plus d’utiliser des matériaux qui captent du carbone, le projet est conçu pour le confort des futurs locataires. Ainsi, malgré l’étroitesse de la parcelle, les logements sont tous traversants et donnent sur une cour intérieure de pleine terre permettant une ventilation naturelle. Le béton de chanvre, quant à lui, favorisera la régularisation du confort intérieur, notamment en période estivale.
Ce projet démontre que la contrainte, lorsqu'elle est intégrée avec ambition, devient une force. C’est de ce partenariat exigeant entre Paris Habitat et notre agence que naît une architecture non seulement qualitative pour ses habitants, adaptée à son environnement mais foncièrement résiliente et valeur d’exemple.
Charlotte Belval & Pierre Parquet